Publié le 07/12/17 à 18h40
Face à une mondialisation accélérée et des migrations de plus en plus incontrôlables, le pluralisme en action s’impose comme l’un des défis majeurs au même titre que la lutte contre le changement climatique. Il est plus que jamais essentiel d’en comprendre les enjeux.
Ces enjeux sont au coeur de la mission du Centre mondial du pluralisme qui le définit comme « une éthique de respect des différences entre les êtres humains ». Cette organisation indépendante et à but non lucratif, créée par l’Aga Khan en partenariat avec le gouvernement canadien, sert de plateforme pour l’analyse comparative, l’éducation et le dialogue sur les choix et actions menés en faveur du pluralisme dans le monde.
À l’agenda de « la conversation mondiale »
Inscrire le pluralisme à l’agenda de la « conversation mondiale » répond à un besoin urgent : favoriser une culture de l’inclusion pour entraver la course folle de la violence, de l’oppression ou de l’ignorance, engendrée par l’exclusion. Il revient à l’ensemble de la société d’amplifier la résonance du pluralisme fondé sur le respect et l’intégrité de la personne humaine, l’égalité entre les femmes et les hommes, les droits des plus vulnérables et ceux des enfants, en particulier.
Encourager le pluralisme en action, c’est l’objectif du Prix mondial du pluralisme dont la première édition a fait l’objet d’une impressionnante cérémonie à Ottawa le 15 novembre dernier. Les trois lauréats sélectionnés par le jury contribuent, par leur courage et leur détermination, à « la création de sociétés dans lesquelles la diversité humaine est protégée et estimée ». Ainsi Alice Wairimu Nderitu du Kenya, infatigable médiatrice de conflit, a intégré les femmes et les jeunes au processus de paix, portant la conviction qu’un dialogue respectueux d’une multiplicité de voix est la seule manière de garantir une paix durable.
Le Colombien Leyner Palacios Asprilla a remédié à la marginalisation et à la violence historiques subies par les communautés africaines et autochtones de la Colombie exclues jusqu’alors des instances de décision. L’Australien Daniel Webb a permis à des demandeurs d’asile d’échapper à des conditions de détention épouvantables et a su construire un plaidoyer efficace en mobilisant ses concitoyens. Outre les lauréats, sept « mentions d’honneur » ont été distinguées parmi lesquelles ATD Quart Monde France qui, depuis 60 ans, agit pour éradiquer la misère et faire changer le regard porté sur les pauvres.
Un « coup d’avance » pour les entreprises
Cette pratique du pluralisme est une ressource pour tous les acteurs y compris ceux du secteur privé. La diversité des expériences, des profils, des sexes, des nationalités des salariés est une source d’innovation et de richesse pour les entreprises. Il est de leur intérêt de prendre cette dimension en compte dans leur gouvernance et leur création de valeur.
En matière de gouvernance, le Parlement européen et le Conseil ont adopté, en ce sens, la directive du 22 octobre 2014 dont les termes sont clairs : « La diversité des compétences et des points de vue des membres des organes d’administration, de gestion et de surveillance des entreprises […] contribue à une surveillance efficace de la gestion et à une bonne gouvernance de l’entreprise ». Elle permet de « battre en brèche le phénomène de la ‘pensée de groupe’ ». Les grandes entreprises doivent désormais rendre compte de la diversité de leurs instances de décision dans leur communication. La culture de l’inclusion dote les dirigeants des moyens nécessaires à une prise de décision éclairée. Elle fait partie des « coups d’avance » qui permettent de progresser sur l’échiquier de la performance globale.
Au coeur de la création de valeur des organisations et de leurs parties prenantes, la responsabilité sociétale d’entreprise (RSE) offre au pluralisme un vaste rayonnement puisqu’il est inhérent au dialogue que mène l’entreprise avec l’ensemble des acteurs de son écosystème. Le pluralisme en action s’impose afin d’anticiper au mieux les attentes des investisseurs, des salariés, des clients, des fournisseurs, des communautés locales, des autorités publiques des pays où l’entreprise exerce son activité. La RSE y recourt comme une force de différenciation et d’anticipation dans une compétitivité exacerbée. Elle est déployée notamment par les directions de ressources humaines. S’attacher les meilleures compétences exige en effet une rigoureuse gestion des talents à l’international comme Les Echos l’ont récemment illustré dans un dossier spécial .
En dépit des positions soutenues par le Président Donald Trump qui vient d’annoncer le retrait des Etats-Unis du Pacte mondial des Nations unies sur les migrants et les réfugiés, le pluralisme en action est nécessaire à la préservation de sociétés diversifiées et pacifiées. Il promet de multiples rendez-vous pris par les Etats, les entreprises et les citoyens sur les scènes nationales et internationale.